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Sarah, Victor, la Colombie
1 juin 2008

Journée à Medellín

Photo_017La ville de l’éternel printemps, du XXIème siècle, de la culture métro, l’attrait d’Amérique latine… toutes ces expressions sont un échantillon des surnoms qui ont été donnés à Medellin. Et c’est vrai qu’il y fait toujours beau et chaud, qu’il y a un super métro (non souterrain) et 2 lignes de téléphérique (on se croirait presque dans les Alpes), que les gens respectent énormément les infrastructures (je n’ai vu aucune dégradation dans le métro qui a pourtant 11 ans). Mais Medellin, c’est aussi une ville énormément contrastée et Carlos Mario n’a pas manqué de me le faire remarquer. C’est incroyable tout ce que j’ai appris avec lui.

Photo_024Carlos Mario vient des quartiers populaires de Medellin, plus exactement d’un quartier surnommé la commune 13. Il a donc vécu l’époque du Cartel de Medellin. Il a eu l’énorme chance d’avoir des parents qui l’ont toujours poussé à étudier, et qui lui ont toujours demandé d’où il ramenait les cadeaux qu’il leur faisait (il vendait des glaces puis des journaux). Ce n’était pas le cas de ses camarades, qui ramenaient des machines à laver, motos… Et les mamans de les féliciter : il est adorable ce garçon ! Mais à quel prix ?

A lui aussi, on lui a souvent proposé d’aller faire « una  vuelta », « un peguadito ». Je ne me rappelle plus de toutes les expressions, mais en gros l’idée c’était de tuer. Tuer pour gagner en échange un super appartement, une moto, et des filles magnifiques toutes siliconées. Pas étonnant quand on voit l’allure des quartiers populaires que beaucoup se prêtaient au jeu. Je pense qu’il a eu vraiment de la chance de ne pas tremper là dedans. Aujourd’hui il est en vie alors que quasiment tous ses copains du quartier sont morts, ce qui laisse à réfléchir. Photo_021

Quelle allure ils ont justement ces quartiers ? Il y a des maisons plus ou moins bien construites. Les plus riches les font en briques, les autres en bois et en tôle. Les toits sont en tôle. Il faut donc y mettre des pierres ou n’importe quel objet assez lourd pour éviter que le toit ne s’envole. On étend le linge sur les toits pour qu’il sèche rapidement. Et puis on voit aussi des gens reconstruire après les incendies qui sont très fréquents, Photo_018à cause des courts-circuits dus à l’usage illégal de l’électricité, et puis de l’utilisation des bougies pour ceux qui n’ont pas l’électricité. Alors forcément quand la maison est de bois et de carton… Les habitants de ces quartiers sont essentiellement aujourd’hui des gens qui ont été déplacés par le conflit armé. Des gens de la campagne qui arrivent à la ville, complètement désemparés et sans perspective.

Je vais maintenant tourner la page et parler de choses plus joyeuses. Enfin pas si joyeuses parce qu’aujourd’hui je me suis rendue compte que je ne comprenais plus rien à l’espagnol ! Je ne vous raconte pas le désespoir ! En réalité j’ai surtout rigolé en écoutant ces gens parler si bizarrement. IlPhoto_016 y a deux choses : le parler « paisa » (c'est-à-dire de la région d’Antioquia), et puis le jargon hérité du passé narco de la ville. C’est un jargon plein de codes dont il est difficile de comprendre le sens sans une aide extérieure, et j’apprends petit à petit. En plus de ça ils ont un accent différent des Bogotanais. Moi qui pensais qu’il me suffirait de remplacer le « tu » par le « vos » et apprendre la conjugaison qui correspond pour parler la langue d’ici… autre surprise ! J’ai peur de prendre de très mauvaises habitudes. Il faut dire qu’ils sont bizarres. Par Photo_026exemple quelle idée d’appeler le plan de travail dans la cuisine « poulet ». Alors ça donne des situations du style : J’ai fini la vaisselle, il ne me reste plus qu’à laver le poulet. Ah bon, après manger ?? Je n’y comprends plus rien.

Il y a une histoire marrante à ce propos, au sujet d’une cocotte minute, appelée ici olla atomica (c’est important pour l’histoire). Un Colombien paisa est allé à Paris rendre visite à un couple d’amis colombien installé en France. Le paisa, même en France, avait tenu à cuisiner ses haricots rouges. Il se dit aussi qu’il fallait sortir les poubelles. Manque de bol, la porte se ferme, et à l’intérieur de l’appart, personne mise à part la ribambelle de haricots rouges dans la cocotte minute. Alors vite il va voir le concierge pour demander un double des clés mais le paisa ne parlait pas un mot de français. Il s’est donc résolu à dire « atomica, atomica » pour essayer de se faire comprendre. Et là, je ne sais pas si vous vous imaginez l’effet de ce petit mot sur le concierge, prononcé par un Colombien en FrancePhoto_022 en pleine époque de guerre froide. Suffisamment de paranoïa pour appeler la police et les pompiers ! Tout ça pour des frijoles…

Le même paisa a récidivé dans l’humour lors de son voyage en demandant du « pan francés » à la boulangerie. Le pauvre, c’est pas de sa faute, c’est comme ça qu’on appelle la baguette ici !

Avant de terminer quelques mots sur Medellin : le centre est très Photo_019agréable, il y a même plusieurs rues piétonnes ! Que du bonheur. Tout est beaucoup plus clean qu’à Bogota, il y a des statues de Botero partout et ça me fait vraiment rire. Les gens sont très sympas, dragueurs évidemment. Je me rappellerai du « kiu cuñado ! » (=salut beau-frère !) d’un jeune homme alors que je marchais avec Carlos Mario. Je penserai qu’à Medellin ce serait peut être différent de Bogota, mais non, les gens repèrent direct que je ne suis pas d’ici avant même que je n’aie prononcé un seul mot. Et très curieux ils veulent tout savoir.

Vous l’aurez compris, tout se passe très bien, cette première journée a été extrêmement riche en découvertes et je ne doute pas que les suivantes le seront encore plus. Pour résumer avec une expression de Medellin, que elegante !

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Commentaires
J
Ca fait un drôle d'effet de t'imaginer dans cette ville aux maisons en tôle ou en bois! Mais c'est aussi formidable de voir qu'une fois de plus, tu es très bien accueillie. Je me demande ce que doivent penser les Colombiens des Français quand ils viennent à leur tour: les trouvent-ils assez hospitaliers?<br /> Et Botero, il est originaire de Medellin pour qu'on le voit aussi bien représenté?<br /> Dans l'attente d'un nouvel article sur le début de ton stage...<br /> Bises
G
T'es article me donne toujours de plus en plus soif d'y être Sarah !<br /> <br /> Sympas l'anecdote olla atomica, j'men souviendrai! Tout comme el pollo...<br /> <br /> C'est vrai ce qu'on dit sur Medelin comme quoi toutes les filles sont guapas?
P
Merci Sarah pour cet article très complet sur ton arrivée à Medellin. Nous sommes très heureux de constater que, côté accueil, tu es plutôt bien tombée.<br /> A plus.<br /> Jacky & Dominique
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